Des règles aux pratiques : l’encadrement juridique du renseignement intérieur en Suisse
En 2017, la Loi sur le renseignement (LRens) légalise le recours aux moyens techniques de recherche d’informations dans le cadre d’enquêtes préventives menées en Suisse. En reconfigurant de façon élargie les missions du Service de renseignement de la Confédération, la loi est toutefois présentée com...
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| Medienart: | Elektronisch Aufsatz |
| Sprache: | Französisch |
| Veröffentlicht: |
2025
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| In: |
Criminologie
Jahr: 2025, Band: 58, Heft: 1, Seiten: 53-74 |
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| Schlagwörter: |
| Zusammenfassung: | En 2017, la Loi sur le renseignement (LRens) légalise le recours aux moyens techniques de recherche d’informations dans le cadre d’enquêtes préventives menées en Suisse. En reconfigurant de façon élargie les missions du Service de renseignement de la Confédération, la loi est toutefois présentée comme respectueuse des libertés individuelles par un encadrement strict de ces investigations. Après avoir identifié les enjeux juridiques et politiques de cette mise en droit, cette contribution se propose d’en analyser la portée pratique. Suivant les mises en garde formulées par la sociologie des institutions, pour qui les règles de droit n’expliquent qu’en partie les pratiques effectives, nous suggérons un déplacement de l’analyse pour envisager le droit à partir du point de vue des personnes chargées de le mettre en oeuvre. À l’aide d’entretiens menés avec des fonctionnaires du renseignement, cette enquête révèle l’ambivalence de leur rapport au droit : tout en le percevant comme un vecteur de légitimation de leur activité, les agents et les agentes déplorent aussi des complications pratiques et la persistance de zones grises dans la loi. Ils admettent néanmoins s’en accommoder en s’appuyant sur les marges de manoeuvre que le droit autorise, en jouant avec les règles, ce qui met en évidence la pertinence d’analyser le droit et son effectivité par l’observation de la manière dont les acteurs et les actrices en font usage. Mots-clés : Renseignement intérieur, Suisse, LRens, sociologie du droit, sociologie des institutions En 2017, la Loi sur le renseignement (LRens) légalise le recours aux moyens techniques de recherche d’informations dans le cadre d’enquêtes préventives menées en Suisse. En reconfigurant de façon élargie les missions du Service de renseignement de la Confédération, la loi est toutefois présentée comme respectueuse des libertés individuelles par un encadrement strict de ces investigations. Après avoir identifié les enjeux juridiques et politiques de cette mise en droit, cette contribution se propose d’en analyser la portée pratique. Suivant les mises en garde formulées par la sociologie des institutions, pour qui les règles de droit n’expliquent qu’en partie les pratiques effectives, nous suggérons un déplacement de l’analyse pour envisager le droit à partir du point de vue des personnes chargées de le mettre en oeuvre. À l’aide d’entretiens menés avec des fonctionnaires du renseignement, cette enquête révèle l’ambivalence de leur rapport au droit : tout en le percevant comme un vecteur de légitimation de leur activité, les agents et les agentes déplorent aussi des complications pratiques et la persistance de zones grises dans la loi. Ils admettent néanmoins s’en accommoder en s’appuyant sur les marges de manoeuvre que le droit autorise, en jouant avec les règles, ce qui met en évidence la pertinence d’analyser le droit et son effectivité par l’observation de la manière dont les acteurs et les actrices en font usage. Mots-clés : Renseignement intérieur, Suisse, LRens, sociologie du droit, sociologie des institutions In Switzerland, the Federal Act on the Intelligence Service (LRens) was enacted in 2017, legalizing the use of technical means for gathering information as part of preventive investigations. Despite broadly reconfiguring the investigations undertaken by the Federal Intelligence Service (SRC), the law has nonetheless been presented as respectful of individual freedoms, thanks to strict oversight. After identifying the legal and political issues surrounding this legislation, this article seeks to analyze its practical impact. Drawing on insights from the sociology of institutions, which argues that legal rules can only partially explain actual practices, we propose shifting the focus of the analysis to the perspectives of those responsible for implementing the law. Through interviews with intelligence officers, this study highlights the ambivalence present in their relationships with the law : While they perceive it as a means of legitimizing their activities, they also deplore its practical complications, as well as the persistent grey zones it contains. The interviewees nevertheless acknowledge having adapted to the law by exploiting its ambiguities via rule manipulation. These results demonstrate the importance of analyzing the law, as well as its effectiveness in terms of how actors make use of it. Keywords: Domestic intelligence, Switzerland, LRens, sociology of law, sociology of institutions |
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| ISSN: | 1492-1367 |
| DOI: | 10.7202/1117820ar |
